Autorisés à rouler, taxis et VTC ont déserté la route faute de clients. Et risquent de passer entre les mailles du filet des aides de l'Etat pour les indépendants.
Ce n'est pas parce que l'on est autorisé à poursuivre son activité que l'on a des clients. Les chauffeurs en savent quelque chose puisque depuis le début de la crise du Covid-19, que ce soit chez les taxis ou les VTC, les voitures ont déserté le pavé. Prenez Heetch, la plateforme française de VTC très présente en banlieue (80% de ses trajets) qui compte habituellement 10 000 chauffeurs actifs par semaine, les trois-quarts se sont déconnectés depuis la mi-mars. "Notre position, c'est de leur dire de rester chez eux. Mais comme ce sont des indépendants, ils ont la liberté. Cependant, vu qu'ils n'entrent pas dans le dispositif du chômage partiel, c'est compliqué pour eux", admet Teddy Pellerin le fondateur de la plateforme.
Dans son train de mesure, le gouvernement avait tout de même prévu un dispositif: une aide forfaitaire de 1500 euros leur est réservée à condition qu'ils enregistrent une baisse d'activité de 70% par rapport au même mois de l'année précédente. Un taux de contraction qui va être ramené à 50% après la publication d'un décret signé ce mardi par le ministre de l'Economie Bruno Le Maire. "Or beaucoup ont travaillé les quinze premiers jours de mars, certains n'y auront donc pas droit", anticipe néanmoins Teddy Pellerin. Pendant ce temps-là, avec le prix de la location de la voiture et les assurances, les charges continuent, elles, de tomber.
"C'est sûr que ça va être dur. Certains chauffeurs ne s'en remettront pas. Mais on doit les aider. C'est pour cela que l'on a lancé un fonds de solidarité de 500 000 euros. J'espère aussi que l'Etat sera bienveillant et ne viendra pas exercer des contrôles fiscaux trop poussés, car c'est la première année que nous envoyons tous les relevés d'activité au Fisc", comme le stipule la loi Sapin II qui impose cette règle aux plateformes (Uber, Airbnb, etc...) pour lutter contre la fraude fiscale.
Dans cet univers du transport de personnes très concurrentiel, où les chauffeurs comme les usagers jonglent entre les plateformes, Heetch versera une aide exceptionnelle fin avril de 200 euros à ses 1000 chauffeurs les plus fidèles. "Nous réfléchissons aussi à un dispositif en sortie de crise, pour équiper les voitures notamment", ajoute le jeune entrepreneur. Car au moment de la relance, il y aura forcément une période de forte activité où les chauffeurs voudront rattraper le temps perdu.
Chez les frères ennemis du bitume, les artisans taxis, l'ambiance n'est pas plus rose. Sur les 18 000 chauffeurs parisiens, entre 80 et 90% seraient à l'arrêt. "Il ne reste plus que les "dialysés", ces chauffeurs qui font la navette vers les hôpitaux pour les patients souffrant de maladies chroniques graves", explique Karim Asnoun de la CGT Taxis. Quelques grosses centrales comme G7 continuent donc d'alimenter les services hospitaliers via une plateforme dédiée, mais pour la très grande majorité des troupes, la voiture est remisée au garage. Ceux qui louent les licences (G7, Slota, environ un millier de taxis), ont tous rendu la radio et désactivé leur compte. Ils ont parfois gardé la voiture pour leur déplacement particulier, ce qui arrange aussi les sociétés qui n'ont pas toujours la capacité de parking pour l'ensemble de leur flotte.
Du reste, à l'image de ses collègues, Karim Asnoun est donc confiné et échange chaque jour avec des chauffeurs qui lui font remonter leurs "angoisses économiques". "Pour la grande majorité d'entre nous, nous sommes des indépendants. Mais à la différence des VTC, nous devons aussi rembourser les prêts pour les licences de taxis", explique le syndicaliste. Hier, il a ainsi reçu un appel d'un chauffeur parisien qui a sollicité ses banques pour différer des remboursements. "L'établissement qui lui a prêté de l'argent pour l'achat de la voiture a été conciliant. Mais la banque chez qui il a le crédit licence, environ 1500 euros par mois, n'a rien voulu entendre", déplore Karim Asnoun.
A ces complications, viennent aussi s'agréger des galères administratives et financières. Et une échéance en particulier tracasse les taxis, la TVA. Ils ont en effet jusqu'au 5 mai pour régler cette ardoise (le taux est à 10%) qui peut vite s'envoler autour de 4000 à 5000 euros pour une activité régulière sur l'année. "Nous avons contacté Bercy à ce sujet qui nous dit que les dispositifs de reports ne concernent que les impôts directs et les cotisations sociales. Par conséquent, la fiscalité indirecte reste due. On a le sentiment que l'on nous prend d'une main l'aide que l'on nous accorde de l'autre", explique le représentant CGT en faisant référence à la fameuse indemnisation de 1500 euros.
Régler ses impôts alors que le cash ne rentre plus est une angoisse grandissante dans les rangs des chauffeurs. D'autant plus que la reprise de l'activité s'annonce longue et n'incite pas à l'optimisme. Certains indicateurs ne trompent pas. Les gares tournent au ralenti et des d'aéroports comme Orly, des lieux prisés par les taxis, ferment leurs portes pour une durée indéterminée. Il faut aussi ajouter les annulations d'événements majeurs comme la fashion-week de juin, traditionnellement une période de pointe pour tous. Chez les indépendants, taxis, comme VTC, la crise du coronavirus laissera à coup sûr des chauffeurs sur le bord de la route.
Source : L'Express
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Ce n'est pas parce que l'on est autorisé à poursuivre son activité que l'on a des clients. Les chauffeurs en savent quelque chose puisque depuis le début de la crise du Covid-19, que ce soit chez les taxis ou les VTC, les voitures ont déserté le pavé. Prenez Heetch, la plateforme française de VTC très présente en banlieue (80% de ses trajets) qui compte habituellement 10 000 chauffeurs actifs par semaine, les trois-quarts se sont déconnectés depuis la mi-mars. "Notre position, c'est de leur dire de rester chez eux. Mais comme ce sont des indépendants, ils ont la liberté. Cependant, vu qu'ils n'entrent pas dans le dispositif du chômage partiel, c'est compliqué pour eux", admet Teddy Pellerin le fondateur de la plateforme.
Dans son train de mesure, le gouvernement avait tout de même prévu un dispositif: une aide forfaitaire de 1500 euros leur est réservée à condition qu'ils enregistrent une baisse d'activité de 70% par rapport au même mois de l'année précédente. Un taux de contraction qui va être ramené à 50% après la publication d'un décret signé ce mardi par le ministre de l'Economie Bruno Le Maire. "Or beaucoup ont travaillé les quinze premiers jours de mars, certains n'y auront donc pas droit", anticipe néanmoins Teddy Pellerin. Pendant ce temps-là, avec le prix de la location de la voiture et les assurances, les charges continuent, elles, de tomber.
"C'est sûr que ça va être dur. Certains chauffeurs ne s'en remettront pas. Mais on doit les aider. C'est pour cela que l'on a lancé un fonds de solidarité de 500 000 euros. J'espère aussi que l'Etat sera bienveillant et ne viendra pas exercer des contrôles fiscaux trop poussés, car c'est la première année que nous envoyons tous les relevés d'activité au Fisc", comme le stipule la loi Sapin II qui impose cette règle aux plateformes (Uber, Airbnb, etc...) pour lutter contre la fraude fiscale.
Dans cet univers du transport de personnes très concurrentiel, où les chauffeurs comme les usagers jonglent entre les plateformes, Heetch versera une aide exceptionnelle fin avril de 200 euros à ses 1000 chauffeurs les plus fidèles. "Nous réfléchissons aussi à un dispositif en sortie de crise, pour équiper les voitures notamment", ajoute le jeune entrepreneur. Car au moment de la relance, il y aura forcément une période de forte activité où les chauffeurs voudront rattraper le temps perdu.
Chez les frères ennemis du bitume, les artisans taxis, l'ambiance n'est pas plus rose. Sur les 18 000 chauffeurs parisiens, entre 80 et 90% seraient à l'arrêt. "Il ne reste plus que les "dialysés", ces chauffeurs qui font la navette vers les hôpitaux pour les patients souffrant de maladies chroniques graves", explique Karim Asnoun de la CGT Taxis. Quelques grosses centrales comme G7 continuent donc d'alimenter les services hospitaliers via une plateforme dédiée, mais pour la très grande majorité des troupes, la voiture est remisée au garage. Ceux qui louent les licences (G7, Slota, environ un millier de taxis), ont tous rendu la radio et désactivé leur compte. Ils ont parfois gardé la voiture pour leur déplacement particulier, ce qui arrange aussi les sociétés qui n'ont pas toujours la capacité de parking pour l'ensemble de leur flotte.

Du reste, à l'image de ses collègues, Karim Asnoun est donc confiné et échange chaque jour avec des chauffeurs qui lui font remonter leurs "angoisses économiques". "Pour la grande majorité d'entre nous, nous sommes des indépendants. Mais à la différence des VTC, nous devons aussi rembourser les prêts pour les licences de taxis", explique le syndicaliste. Hier, il a ainsi reçu un appel d'un chauffeur parisien qui a sollicité ses banques pour différer des remboursements. "L'établissement qui lui a prêté de l'argent pour l'achat de la voiture a été conciliant. Mais la banque chez qui il a le crédit licence, environ 1500 euros par mois, n'a rien voulu entendre", déplore Karim Asnoun.
A ces complications, viennent aussi s'agréger des galères administratives et financières. Et une échéance en particulier tracasse les taxis, la TVA. Ils ont en effet jusqu'au 5 mai pour régler cette ardoise (le taux est à 10%) qui peut vite s'envoler autour de 4000 à 5000 euros pour une activité régulière sur l'année. "Nous avons contacté Bercy à ce sujet qui nous dit que les dispositifs de reports ne concernent que les impôts directs et les cotisations sociales. Par conséquent, la fiscalité indirecte reste due. On a le sentiment que l'on nous prend d'une main l'aide que l'on nous accorde de l'autre", explique le représentant CGT en faisant référence à la fameuse indemnisation de 1500 euros.
Régler ses impôts alors que le cash ne rentre plus est une angoisse grandissante dans les rangs des chauffeurs. D'autant plus que la reprise de l'activité s'annonce longue et n'incite pas à l'optimisme. Certains indicateurs ne trompent pas. Les gares tournent au ralenti et des d'aéroports comme Orly, des lieux prisés par les taxis, ferment leurs portes pour une durée indéterminée. Il faut aussi ajouter les annulations d'événements majeurs comme la fashion-week de juin, traditionnellement une période de pointe pour tous. Chez les indépendants, taxis, comme VTC, la crise du coronavirus laissera à coup sûr des chauffeurs sur le bord de la route.
Source : L'Express
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