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Info "La loi mobilités, une réforme ni sociale ni responsable"


Info "La loi mobilités, une réforme ni sociale ni responsable"

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AZF

La passion du VTC
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VTC
14 Décembre 2016
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Localité
Paris
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Toyota Prius 4
TRIBUNE - Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT et François Hurel, président de l’Union des auto-entrepreneurs, dénoncent les effets pervers de l'article 20 de la loi d’orientation des mobilités, que le Parlement s'apprête à voter.
François Hurel (auto-entrepreneurs) et Laurent Berger (CFDT) dénoncent l'article 20 de la loi d'orientation des mobilités.

Voici la tribune de Laurent Berger, secrétaire général de la CFDT et François Hurel, président de l’Union des auto-entrepreneurs : "La loi d’orientation des mobilités, que le Parlement s’apprête à voter, prévoit un article 20 sur la responsabilité sociale des plateformes, qui dépasse le seul domaine des transports. Le texte vise à inciter ces dernières à prendre des engagements vis-à-vis des travailleurs indépendants qui utilisent leurs services, en termes de conditions de travail, mais aussi de protection sociale. Alors que plusieurs décisions de justice requalifiant des travailleurs indépendants ont été rendues à l’encontre des plateformes, le gouvernement semble vouloir acheter la paix juridique en se positionnant comme un rempart contre cette requalification en salariés. L’objectif de ce texte semble donc être de protéger les plateformes plutôt que ceux qui y travaillent et notamment les travailleurs indépendants.
Un détournement du droit​
Car que dit cet article 20 du projet? Que toute plateforme ayant proposé une charte à ses travailleurs bénéficierait d’une présomption de travail indépendant et que ce serait désormais au juge et aux travailleurs eux-mêmes, et non plus à la plateforme, d’apporter la preuve inverse. L’idée de ce renversement de la présomption n’est pas nouvelle, sauf que dans ce cas, elle ne s’appliquerait qu’au bénéfice des seules plateformes, ce qui constitue un détournement du droit.
Ces chartes, unilatérales, seraient homologuées par l’administration. Il s’agit donc officiellement de substituer, à la sanction juridique a posteriori de la requalification, un espace de discussion a priori entre les plateformes et les pouvoirs publics (l’administration du travail).
Toutefois, ni l’administration, ni les travailleurs indépendants n’auront de levier pour améliorer la situation matérielle de ces derniers : ces chartes inféoderont ni plus ni moins les travailleurs à la plateforme dont elles prétendaient les émanciper. De fait, les travailleurs ayant souscrit une protection sociale auprès d’une plateforme seront sous l’emprise de celle-ci, et évidemment moins enclins à travailler pour d’autres ou encore à trouver leurs propres clients en direct. Et ils ne pourront négocier ni individuellement ni collectivement les conditions qui s’appliquent à eux.
Ce projet constitue un cache-misère juridique : au lieu de s’attaquer à la cause des demandes de requalification - absence de protection sociale de ces indépendants, faiblesse de rémunérations parfois inférieures au salaire minimum, subordination déguisée -, on s’attaque au droit de la requalification lui-même, au risque de fragiliser l’ensemble du salariat par détournement du contrat d’indépendant en lieu et place du contrat de travail, et en créant, qui plus est, de l’inégalité au sein de l’ensemble des indépendants.
Une sorte de rustine qui ne pourra satisfaire que les plateformes​
Le projet repose en outre sur une vision très incomplète de la sécurisation des parcours, quand de plus en plus de nos concitoyens alternent ou cumulent activité indépendante et emploi salarié, études et/ou retraite. Il crée, à rebours de la réflexion sur la sécurisation des personnes, un troisième statut entre indépendance et salariat, statut pourtant rejeté unanimement par la société civile organisée au Conseil économique, social et environnemental (Cese).
Au lieu d’universaliser et de rendre portable la protection sociale, comme le président de la République l’avait évoqué, on crée une sorte de rustine qui ne pourra satisfaire que les plateformes : elles échapperont ainsi à peu de frais à toute obligation de dialogue, de négociation, à toute obligation permettant d’assurer une rémunération et une protection légitimement attendue par ces collaborateurs indépendants.
Un travailleur indépendant doit conserver la liberté de facturer et d’alterner les donneurs d’ordre. Les plateformes qui, au nom de la fidélisation, multiplient déjà les mesures dissuadant d’alterner le travail avec leurs concurrentes, donc organisent des formes de dépendance économique exclusive, pourront ajouter à cette dépendance économique la subordination sociale.
Pour ces travailleurs indépendants, le bilan risque d’être amer : ni meilleure rémunération, ni négociation, ni requalification.
Les auto-entrepreneurs, une famille qui a 10 ans et n’est toujours pas représentée dans la négociation sur l’avenir de la protection sociale​
En agissant de la sorte, la France se rapproche à pas feutrés d’un troisième statut à mi-chemin entre salariat et indépendance, au risque de déstabiliser le premier, et de fragiliser la situation de ceux qui choisissent le second. Pour y répondre, c’est bien la protection sociale qu’il faut refonder.
Elle s’est bâtie dans notre pays autour de l’indemnisation de la perte involontaire d’activité, qui recouvre la santé (maladie, maternité), l’accident du travail, le chômage et la retraite qui, elle, est volontaire. Cet ensemble doit constituer une forme de 'droit de l’actif' qu’il convient de mieux organiser.
La juste réponse est connue : ce n’est pas 'bricoler' une protection à bon compte mais la poser comme un principe de toute activité professionnelle, et de la faire évoluer en l’associant à la personne plutôt qu’au statut, pour épouser des parcours professionnels moins linéaires et plus composites. C’est également permettre aux travailleurs de construire les droits qui s’appliquent à eux et passer de la 'Charte octroyée' monarchiquement par les plateformes à leur négociation collective.
Les travailleurs des plateformes font majoritairement partie des 1,4 million d’auto-entrepreneurs nés pendant cette dernière décennie seulement et des 3,3 millions de travailleurs indépendants que compte notre pays. Une famille qui a 10 ans et qui n’est toujours pas représentée dans la négociation sur l’avenir de la protection sociale, une ignorance qui ne peut d’ailleurs plus durer.
On ne répondra pas au risque de protection sociale lacunaire en organisant la dépendance de certains à l’égard de plateformes mondiales​
C’est méconnaître les ressorts de cette nouvelle économie, ignorer les modifications du travail en cours et, d’une certaine façon, mépriser ceux qui les vivent, que de ne pas les inviter à la table des négociations.
Bien au contraire, le sujet de la protection des travailleurs des plateformes devrait être pleinement intégré dans une réflexion globale sur la protection sociale des travailleurs indépendants, sur la traduction du socle français et européen des droits sociaux pour ces professionnels.
On ne répondra pas au risque de protection sociale lacunaire, de retraite anormalement basse parmi les travailleurs indépendants, en organisant la dépendance de certains à l’égard de plateformes mondiales. Quand allons-nous enfin nous asseoir autour d’une table pour discuter sereinement d’un véritable contrat de progrès social pour tous les travailleurs indépendants, d’un véritable socle de droits pour tout actif?"

Laurent Berger et François Hurel : "La loi mobilités, une réforme ni sociale ni responsable"
 


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21 Janvier 2015
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Il ne faut pas que cet article 20 passe, c'est clair. D'ailleurs, il a été rédigé non pas dans un ministère, mais par un cabinet privé payé par une ou des plateformes.
 
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